La RSE et la loi sur le devoir de vigilance poussent les entreprises à une prudence accrue quant aux pratiques des partenaires commerciaux avec qui elles traitent, y compris les influenceurs. Pour cette raison, et dans l’objectif d’améliorer ou de conserver leur réputation, les influenceurs doivent mettre au cœur de leurs valeurs les préoccupations sociales et environnementales. Les entreprises doivent quant à elles veiller à évaluer l’intégrité de ceux-ci et l’adéquation de leurs comportements avec leurs valeurs.
La responsabilité sociétale des entreprises et la loi sur le devoir de vigilance
La Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) est définie par la Commission européenne comme « l’intégration volontaire par les entreprises de préoccupations sociales et environnementales à leurs activités commerciales et leurs relations avec les parties prenantes » [1].
L’objectif des entreprises pratiquant la RSE est d’avoir un impact positif sur l’environnement et la société. Pour cela, les entreprises mettent en œuvre des mesures sur sept thématiques principales à savoir la gouvernance de l’organisation, les droits de l’homme, les relations et conditions de travail, l’environnement, la loyauté des pratiques, les questions relatives aux consommateurs, les communautés et le développement durable.
La RSE étant une démarche volontaire, peu d’effets étaient ressentis et le drame du Rana Plaza au Bangladesh en 2013 remettait au centre des préoccupations les modèles de consommation et de mondialisation et notamment l’usage des chaînes de production dont chacun ignorait le fonctionnement car peu transparent.
Ainsi, en 2017, la loi sur le devoir de vigilance [2] instituait l’article L. 225-102-4 du code de commerce qui précise que sont assujetties à l’obligation de mettre en place un plan de vigilance toutes les sociétés employant, sur deux exercices consécutifs, plus de 5.000 salariés lorsque toutes les sociétés du groupe sont en France ou plus de 10.000 salariés si les sociétés du groupe sont réparties entre la France et l’étranger.
Le devoir de vigilance s’applique aux activités de la société donneuse d’ordre, de ses filiales directes et indirectes, ainsi que des sociétés qu’elle contrôle. Il s’applique également à l’ensemble de sa chaîne d’approvisionnement, à savoir les fournisseurs et/ou les sous-traitants avec lesquelles une relation commerciale est établie, ce qui est le cas des influenceurs pour que les valeurs mises en œuvre dans le cadre de ces plans s’étendent au-delà de la sphère sociale, dans l’écosystème complet.
Les entreprises donneuses d’ordre sont assujetties à cinq obligations à savoir établir une cartographie des risques ; mettre en place des actions adaptées visant à atténuer les risques et prévenir les atteintes graves ; mettre en œuvre des procédures d’évaluation régulière des filiales, sous-traitants ou fournisseurs ; instituer un dispositif d’alerte et de recueil des signalements ; déployer un dispositif de suivi des mesures et d’évaluation de leur efficacité.
Le devoir de vigilance pourrait prochainement être étendu au niveau européen à un plus grand nombre d’entreprises.
Les influenceurs sont aujourd’hui de plus en plus critiqués en raison de leur mode de vie incompatible avec les enjeux climatiques mais également en raison du caractère infractionnel de certains contenus parfois perçus comme relevant de pratiques déloyales vis-à-vis des consommateurs.
Si le secteur de l’influence, encore peu régulé pour l’heure, peut être perçu comme une source de problèmes, il doit devenir, demain, une source de solutions pour promouvoir l’éthique auprès de leurs communautés.
Le mode de vie des influenceurs a pendant plusieurs années fait rêver bon nombre de personnes (jeux concours, voyages en jet privé, voitures de sport luxueuses, fast-fashion, etc.) mais face aux conséquences récentes du changement climatique (incendie, sécheresse, inondations, etc.), ce mode de vie est de plus en plus décrié car contraire aux comportements éthiques et soucieux de l’environnement.
Certains mouvements tels que « Paye ton influence » ou la lettre ouverte des étudiants de l’Université Paris-Dauphine, ainsi que le GIEC tentent de dénoncer et d’alerter quotidiennement sur ces pratiques non éthiques et peu responsables des influenceurs tout en précisant que les influenceurs sociaux et les leaders d’opinion peuvent favoriser l’adoption de nouveaux modes de vie plus faible en émission de carbone.
En ce sens, certaines agences d’influence mettent le sujet de l’éthique environnemental au centre de leurs objectifs estimant qu’il convient de former et sensibiliser les influenceurs pour leur permettre de prendre conscience des différents impacts des modes de vie qu’ils défendent.
Ces sujets sont également mis en avant par nombre de d’entreprises assujetties à la loi vigilance ou ayant fait le choix de se conformer volontairement à des normes RSE et peuvent être des critères indispensables à la conclusion d’un contrat de partenariat.
Un grand nombre d’influenceurs réalisent des publications sponsorisées auprès de leur communauté, leur permettant ainsi d’être rémunéré et si certain influenceurs, et leurs partenaires sont de plus en plus soucieux de s’assurer que leurs communautés soient averties lorsque les publications sont sponsorisées, il en demeure une méconnaissance des pratiques loyales envers les consommateurs, pouvant conduire certains influenceurs à commettre des infractions telles que les pratiques commerciales trompeuses.
Pour permettre aux influenceurs d’être sensibilisés à ces sujets et donner des gages de confiance à leurs partenaires, l’Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité (ARPP) a créé en 2021 un certificat de l’influence responsable évoquant les recommandations déontologiques de l’ARPP, les règles de transparence avec les partenaires, et les règles spécifiques applicables à certains secteurs (environnement, santé, cosmétique, produits alimentaires, jeux d’argent, etc.).
La promotion d’un marketing d’influence éthique et responsable permet aux professionnels de l’influence d’avoir une assise et une légitimité dans l’univers de la publicité et de devenir un partenaire de confiance pour les entreprises.
[1] COMMUNICATIONDE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU CONSEIL, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN ET AU COMITÉ DES RÉGIONS Responsabilité sociale des entreprises : une nouvelle stratégie de l'UE pour la période 2011-2014
[2] La loi n° 2017-399 du 27 mars 2017