Honorabilité des encadrants et protection des mineurs dans le sport

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Ce qu'il faut retenir

Le 29 février 2024, l'Assemblée nationale française a adopté à l'unanimité une loi visant à combattre les violences sexuelles envers les mineurs dans le sport. Inspirée par le témoignage de l'ancienne championne de patinage Sarah Abitbol et portée par le sénateur Sébastien Pla, cette législation introduit des mesures telles que le contrôle annuel des antécédents judiciaires des éducateurs sportifs et l'obligation pour les présidents de clubs de signaler tout comportement à risque. Cette loi, qui étend également le contrôle d'honorabilité aux bénévoles, représente une réponse aux nombreuses affaires de violences révélées ces dernières années, marquant un engagement fort de la société française dans la protection de ses jeunes sportifs. Elle souligne la nécessité d'une vigilance accrue et d'une culture de responsabilité au sein des structures sportives, visant à éradiquer un fléau longtemps ignoré et à assurer un environnement plus sûr pour les mineurs.

Pour approfondir

Quel est le contexte de la loi ?

Le 29 février 2024 marque une avancée significative dans la lutte contre les violences sexuelles envers les mineurs dans le milieu sportif français. L'Assemblée nationale, dans une rare unanimité, a adopté une proposition de loi initiée par des députés socialistes et déjà approuvée par le Sénat, visant à renforcer les mesures de prévention et de contrôle au sein des clubs sportifs. Cette législation intervient dans un contexte où le secteur sportif se trouve confronté à des révélations troublantes et à une prise de conscience collective sur la nécessité de protéger les plus vulnérables.

Le texte législatif, élaboré avec la collaboration notable de l'ancienne championne de patinage Sarah Abitbol, qui a courageusement témoigné des violences sexuelles subies dans sa jeunesse ,représente un pas décisif vers la sécurisation d'un espace jusque-là marqué par l'omerta. En rendant annuel le contrôle des antécédents judiciaires des éducateurs sportifs et en instaurant des obligations de signalement pour les présidents de clubs, la loi vise à ériger un barrage contre les prédateurs et à instaurer une culture de vigilance et de responsabilité. Ce texte s'inscrit dans un mouvement plus large de reconnaissance et de lutte contre les violences sexuelles, affirmant l'engagement de la société française dans la protection de ses jeunes sportifs.

Au cours des dernières années, le monde sportif français a été secoué par une série d'affaires de violences sexuelles, révélant une réalité sombre et longtemps tue. Ces révélations ont suscité une onde de choc à travers la société, mettant en lumière la vulnérabilité des mineurs au sein des clubs sportifs, des lieux où la confiance et le respect devraient régner. Face à cette situation alarmante, la nécessité d'agir s'est imposée avec urgence, menant à l'adoption de la nouvelle loi le 29 février 2024.

La sacralisation de la figure de l'entraîneur, la quête de performance à tout prix, et les difficultés pour les jeunes victimes de parler des actes subis par une personne en position de confiance ont longtemps contribué à un silence complice autour de ces violences. Le courageux témoignage de Sarah Abitbol, ancienne championne de patinage, sur les viols perpétrés par son entraîneur durant son adolescence, a joué un rôle catalyseur, incitant à une prise de conscience collective et à l'action politique. Sa collaboration avec le sénateur Sébastien Pla dans l'élaboration de ce texte législatif souligne l'importance de la parole des victimes dans la lutte contre les violences sexuelles.

Le constat est sans appel : malgré une obligation d'honorabilité déjà en vigueur, le contrôle des antécédents judiciaires des éducateurs sportifs se révélait insuffisant, notamment en ce qui concerne les bénévoles, qui constituent la majorité des encadrants dans le sport français. Avant l'entrée en vigueur de cette loi, une grande partie des contrôles s'effectuait de manière ponctuelle et inégale, laissant de nombreuses failles dans le système de prévention.

Quelles sont les nouvelles mesures ?

La nouvelle législation adoptée par l'Assemblée nationale le 29 février 2024 constitue un tournant dans la lutte contre les violences sexuelles envers les mineurs dans l'univers sportif. En réponse à un appel général pour plus de sécurité et de transparence, cette loi introduit des mesures rigoureuses et ciblées visant à renforcer le cadre de prévention et de contrôle au sein des clubs sportifs.

Une des mesures phares de cette loi est l'instauration d'un contrôle annuel des antécédents judiciaires pour tous les éducateurs sportifs, qu'ils soient professionnels ou bénévoles. Ce contrôle systématique porte sur le bulletin n° 2 du casier judiciaire ainsi que sur le Fichier Judiciaire Automatisé des Auteurs d'Infractions Sexuelles ou Violentes (FIJAIS), garantissant ainsi qu'aucune personne condamnée pour des faits de violences, notamment sexuelles, ne puisse exercer auprès de mineurs. Cette mesure répond à une faille majeure du système précédent, où seuls les professionnels étaient soumis à un contrôle systématique et annuel, laissant les bénévoles dans une zone grise de surveillance. En effet, l'un des aspects novateurs de cette loi est son extension du contrôle d'honorabilité aux bénévoles, qui représentent une part importante des encadrants dans le monde sportif. Cette mesure vient combler un vide juridique et sécuritaire, assurant que tous ceux qui œuvrent auprès des jeunes sportifs sont soumis à un examen rigoureux de leur passé judiciaire.

La loi rend obligatoire pour les présidents de clubs sportifs le signalement aux services de l'État des comportements à risques identifiés chez les éducateurs ou toute autre personne en contact avec des mineurs. Cette disposition vise à établir une chaîne de vigilance active, où les comportements préoccupants sont systématiquement rapportés et traités par les autorités compétentes, sous peine de sanctions pour les clubs défaillants. Cette mesure représente un pas significatif vers une culture de la responsabilité et de la prévention au sein des structures sportives.

La loi prévoit des sanctions sévères en cas de manquement aux nouvelles obligations. Les présidents de clubs qui omettraient de signaler des comportements à risques s'exposent désormais à des sanctions, soulignant la gravité de leur rôle dans la protection des mineurs. De plus, la loi étend le spectre des mesures administratives spécifiques pouvant être prises à l'encontre des dirigeants de clubs sportifs, renforçant ainsi les moyens d'action contre les structures non conformes. En effet, une interdiction temporaire ou définitive d’exercer pourra être prononcée contre un dirigeant de club lorsqu’il représente lui-même un danger pour la sécurité et la santé physique ou morale des pratiquants du club, lorsqu’il emploie une personne ne respectant pas les conditions d’honorabilité ou un éducateur sportif interdit d’exercer et lorsqu’il ne signale pas à l’administration des comportements à risque d’un éducateur sportif au sein de son club. Le non-respect de cette interdiction de diriger sera puni d’un an d’emprisonnement et de 15.000 euros d’amende.

 

Quels sont les défis majeurs ?

A l’instar de nombreuses mesures de vigilance, obligatoire ou intégrées volontairement, cette loi vise à instaurer un environnement sportif plus sûr pour les mineurs, en éliminant autant que possible les risques d'exposition à des individus aux antécédents judiciaires préoccupants ou à des individus aux comportements inadéquats.

En facilitant le signalement des comportements à risque et en sanctionnant les manquements à cette obligation, la loi s'attaque directement à la culture du silence et de l'omerta qui a longtemps prévalu dans certains milieux sportifs. Les victimes et témoins de violences devraient se sentir plus soutenus et encouragés à parler, sachant que les structures sportives sont désormais tenues de prendre au sérieux et de traiter efficacement leurs signalements.

La sensibilisation des acteurs du monde sportif aux risques et aux signes des violences sexuelles est essentielle. Des programmes de formation continue doivent être développés pour équiper les éducateurs, les dirigeants de clubs, et les sportifs eux-mêmes, des connaissances et des outils nécessaires pour prévenir les abus et intervenir de manière appropriée en cas de suspicion.

Un des principaux défis réside dans l'application homogène de la loi sur tout le territoire. Assurer une mise en œuvre effective nécessite des ressources, une formation adaptée des responsables de clubs, et une collaboration étroite entre les différentes instances sportives et les autorités judiciaires. Le suivi régulier des contrôles d'honorabilité et des signalements représente également un enjeu majeur pour garantir la réactivité et l'efficacité du dispositif.

 

Quelle intégration dans le dispositif d’alerte ?

La mise en place d'un dispositif d'alerte au sein des structures sportives constitue une obligation légale pour celles qui emploient plus de 50 salariés et cela vise à renforcer la prévention et la gestion des cas de violences, notamment sexuelles, envers les mineurs.

Ce dispositif offre un canal dédié au signalement des infractions, assurant ainsi que toute suspicion ou constatation d'acte répréhensible puisse être rapportée de manière confidentielle et sécurisée.

Il est crucial que la procédure établie dans ce cadre prévoie explicitement la possibilité pour le président du club de procéder au signalement des violences subies par des mineurs. Cette précision vise à garantir que les cas les plus graves ne restent pas sans réponse, en confiant aux responsables des structures une part active dans la chaîne de protection des jeunes athlètes.

En somme, l'existence d'un tel dispositif d'alerte, assortie de la responsabilité directe des présidents dans le processus de signalement, est essentielle pour créer un environnement sportif où la sécurité et le bien-être des mineurs sont prioritaires.

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