Les parlementaires et le Conseil constitutionnel ont approuvé l’utilisation de la vidéosurveillance intelligente à titre expérimental. L’article 10 de la loi du 19 mai 2023 relative aux JO Paris 2024 permet d’instaurer de tels dispositifs dans le cadre des grands évènements sportifs, récréatifs et culturels jusqu’en 2025.
A l’occasion des JO Paris 2024, le Comité d’Organisation des Jeux Olympiques (COJO) a signé un protocole de sécurité avec l’Etat français, répartissant leurs responsabilités en matière de sécurité. Le COJO sera ainsi responsable des sites et l’Etat sera responsable de la sécurité à l’extérieur de ceux-ci.
Dans l’objectif d’éviter des incidents sécuritaires, à l’instar de ceux qui ont eu lieu au Stade de France lors de la finale de la ligue des champions en mai 2022, la loi du 19 mai 2023 relative aux JO [1] instaure diverses mesures de dérogations aux règles normales et certaines expérimentations parmi lesquelles figurent l’usage de la vidéoprotection intelligente, ou l’usage des scanners corporels à l’entrée des stades. Ces mesures viennent en complément de celles adoptées dans le cadre de la loi du 26 mars 2018 [2].
S’agissant de la vidéosurveillance intelligente, la loi du 19 mai 2023 instaure ce système à titre expérimental afin d’assurer la sécurité des personnes présentes dans le cadre des manifestations sportives, récréatives ou culturelles, du jour de sa promulgation jusqu’au 31 mars 2025. Cette expérimentation est donc prévue dans un temps restreint et un lieu préalablement déterminé, à savoir les lieux accueillant des manifestations sportives, récréatives ou culturelles, leurs abords de ces lieux et les transports en commun. En effet, la loi prévoit une amélioration de la coordination des forces de sécurité en étendant le champ des images de vidéosurveillance aux agents de la RATP et de la SNCF.
Selon la CNIL, les dispositifs de vidéosurveillance intelligente ou augmentée sont constitués de logiciels de traitements automatisés d’images couplés à des caméras ou des drones. Alors que la vidéosurveillance standard se limite à la captation d’images, la transmission d’images sur des moniteurs et l’enregistrement d’images, la vidéosurveillance intelligente permet d’analyser les images en complément du regard de l’opérateur.
Cela permet ainsi de prévenir des incidents en détectant des comportements suspects, des mouvements de foule ou même un sac abandonné, de déclencher des alarmes en temps réel, d’aider les enquêteurs grâce à une optimisation des images. Certains professionnels estiment que la vidéosurveillance intelligente limite le taux d’erreur avec moins de 0,5 % de fausses alertes par jour et par caméra.
La vidéosurveillance intelligente ne peut utiliser aucune technique de reconnaissance faciale, aucun système d’identification biométrique et aucune données biométriques. Ce sont là des garanties importantes pour les libertés individuelles.
Le recours aux traitements par intelligence artificielle sera autorisé par décret pour chaque manifestation, après avis de la CNIL car cette autorité garde un contrôle a priori sur ces mesures. Une consultation publique sur ce décret pourrait être organisée par le gouvernement.
En effet, l’autorité administrative, à savoir le représentant de l’État dans le département ou le préfet de police à Paris, doit autoriser au préalable de telles mesures afin qu’elles puissent être mises en œuvre. Cette décision d’autorisation fixe globalement l’autorité en charge du traitement et les services associés à sa mise en œuvre, les évènements ciblés (manifestations sportives, récréatives et culturelles, etc.), la zone géographique concernée et les motifs de la mise en œuvre du traitement, les modalités d’information du public ainsi que la durée du traitement.
Il importera donc de vérifier si la procédure pénale ne comporte pas de nullité dans le cas où ces vidéosurveillances auraient été utilisées en dehors du cadre prévu.
Le Conseil constitutionnel a jugé [3], concernant l’article 10, que pour répondre à l’objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l’ordre public, le législateur peut autoriser le recours à des caméras dites intelligentes. Il a toutefois émis une réserve d'interprétation sur la durée de l'autorisation du recours à ce dispositif. Les préfets devront immédiatement mettre fin à l'autorisation lorsque les conditions qui ont justifié sa délivrance ne sont plus réunies.
Le régime dérogatoire implique également l’extension des compétences du préfet de police de Paris à toute l’île de France pendant la période des jeux, et l’élargissement de la procédure de criblage (enquête administrative de sécurité) aux fan zones ainsi qu’aux participants comme les athlètes, les délégations, les médias ou les partenaires
Des scanners corporels pourront enfin être utilisés à l’entrée des stades et enceintes accueillant plus de 300 personnes pour fluidifier les contrôles.
[1] Loi du 19 mai 2023 relative aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 et portant diverses autres dispositions
[2] Loi du 26 mars 2018 relative à l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024
[3] Conseil Constitutionnel, 17 mai 2023, n° 2023-850, DC