Si depuis quelques années, de nombreux sportifs font état d’actes de maltraitance commis à leur encontre, cette notion revêt en réalité plusieurs facettes et couvre plusieurs infractions dont la gravité peut différer. Il convient de bien identifier ces infractions et de mettre en place, au sein des entités sportives comme les fédérations et les clubs, des campagnes de sensibilisation pour former tous les acteurs à leur détection, et les membres clés à prendre des mesures appropriées en cas de signalement.
Alors que la pratique sportive doit être synonyme de passion, d’efforts, de dépassement de soi et d’esprit d’équipe, ces valeurs sont parfois éclipsées par des cas de maltraitance, touchant principalement les jeunes sportifs.
Depuis quelques années, plusieurs anciens sportifs, notamment issus du monde de la gymnastique, du patinage artistique ou de la natation, évoquent plus librement certains comportements des entraineurs, des éducateurs sportifs et des encadrants.
Récemment, de nombreux cas de viols et d’agressions sexuelles ont été dénoncés, de même que des violences physiques et psychologiques. En effet, depuis 2020, plus de 600 signalements de violences ont été recensés via le système de signalement des violences dans le sport mis en place par le ministère des Sports [1]. Parmi les signalements, 90 % concernaient des faits à connotation sexuelle et 10 % des faits de violences physiques ou psychologiques (chiffres dévoilés à l’Assemblée nationale, lors de la 3e convention de prévention des violences dans le sport) [2].
Par exemple, la Fédération Française de Gymnastique fait aujourd’hui l’objet d’une enquête mise en œuvre par le ministère des Sports après des témoignages évoquant des pratiques humiliantes et dangereuses qui auraient été commises par un couple d’éducateurs sportifs et une encadrante, à savoir des remarques dégradantes, des pressions alimentaires, des pressions pour réaliser des performances malgré une blessure, voire des coups.
La maltraitance n’est pas définie par le code pénal puisqu’elle peut en réalité recouvrir plusieurs infractions, dont la gravité peut être plus ou moins importante. La maltraitance peut être découpée en trois type d’infractions : les violences sexuelles, les autres violences volontaires ainsi que la mise en danger et les violences involontaires.
Les violences à caractère sexuel sont les plus nombreuses dans le monde du sport et peuvent prendre plusieurs formes, allant du harcèlement sexuel [3] au viol [4], en passant par l’agression sexuelle [5]. Il semblerait malheureusement que le rapport entre l’éducateur sportif et l’athlète favorise ce type de violences dès lors que les contacts physiques pour aider ou orienter le sportif sont monnaie courante.
Dans l’objectif de sanctionner plus durement les éducateurs sportifs qui useraient de leurs pouvoirs pour exercer des pressions sur les jeunes athlètes, le code pénal prévoit des circonstances aggravantes relatives à la minorité de la victime (moins de 15 ans) ainsi qu’à l’auteur qui peut être « une personne qui abuse de l’autorité que lui confèrent ses fonctions ».
Bien que moins nombreuses, les violences physiques et psychologiques peuvent avoir un impact très fort, notamment sur de jeunes sportifs.
Concernant les violences physiques volontaires, la sanction de l’auteur dépendra du résultat de l’agression mais également des éventuelles circonstances aggravantes telles que la préméditation, l’existence de coauteurs, la présence d’un mineur ou l’usage d’une arme. Pour exemple, des violences volontaires ayant entraîné une ITT de plus de 8 jours avec l’usage d’une arme et avec préméditation peuvent être sanctionnées jusqu’à 7 ans d’emprisonnement et 100.000 euros d’amende.
Les violences physiques peuvent également aller plus loin et être qualifiées de tortures et acte de barbarie [6], voire de meurtre [7]. Dans ce cas, ces crimes sont sanctionnés par des peines pouvant aller jusqu’à la réclusion criminelle à perpétuité.
Les violences peuvent également être psychologiques et être qualifiées de harcèlement moral. En effet, le harcèlement moral correspond à des comportements répétés susceptibles de causer une altération de sa santé physique ou mentale [8]. Il peut s’agir de propos dégradants, de brimades, d’humiliations, etc.
La mise en danger est le fait d’exposer une personne à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entrainer une mutilation ou une infirmité permanente par la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement [9]. Ainsi, pour se voir reprocher cette infraction, il importe que l’auteur ait enfreint une obligation spécifique, notamment de sécurité, et que ce manquement soit susceptible d’occasionner pour le sportif la mort ou des blessures particulièrement graves.
Lorsque ces manquements occasionnent un préjudice, l’auteur peut être poursuivi pour des faits d’homicide involontaire [10] ou de blessures involontaires [11].
Dans le cadre de leur action de prévention et de sensibilisation, certaines organisations émettent des guides à destination des acteurs du monde sportif pour prévenir et lutter contre toutes les formes de violence dans le sport. Ainsi, le ministère des Sports et l’Instance Nationale du Supportérisme ont publié la 5e édition du guide juridique sur la prévention et la lutte contre les incivilités, les violences et les discriminations dans le sport en mars 2023.
L’Etat peut, notamment lorsque des faits sont révélés, exercer son contrôle sur les fédérations, peu importe leur caractère d’indépendance [12].
La loi impose également la mise en place d’un processus de lutte et de prévention des violences et des discriminations dans le cadre des activités sportives, notamment via un enseignement [13], ce pourquoi le Comité national olympique a lancé une commission dédiée [14].
La prévention et la sensibilisation peut également être faite au sein des clubs et des fédérations, via des formations relatives à la gestion du risque pénal. L’objectif est de permettre aux victimes de savoir comment agir, à tous les acteurs d’identifier les mauvais comportements et à l’organisation d’agir en cas de signalement.
[1] Sport.gouv.fr : signaler une violence
[2] Violences sexuelles dans le sport : Plus de 600 signalements ont été enregistrés depuis 2020, Ouest France
[3] Article 222-33 du code pénal
[4] Article 222-23 du code pénal
[5] Article 222-22 du code pénal
[6] Article 222-1 du code pénal
[7] Article 221-1 du code pénal
[8] Article 222-33-2-2 du code pénal
[9] Article 223-1 du code pénal
[10] Article 221-6 du code pénal
[11] Article 222-19 du code pénal
[12] Article L.111-1 du code du sport
[13] Article L.211-7 du code du sport
[14] Communiqué de presse du 19 janvier 2022 : Le CNOSF s’engage contre les violences sexuelles et les discriminations dans le sport, site du Comité national olympique et sportif français, 26 janvier 2022